Cet article décrit la construction d'un kayak de surf court (190 cm), inspiré de kayaks tels que le Element (Fluid), le SRR's et le Max (Mega), ou le Squashtail (Dragorossi). Comme c'est le premier kayak de surf que je concois et que je n'ai jamais testé un kayak de ce type, je me suis inspiré de photos et de mon expérience.
Mon approche a été de tendre la ligne, ce qui est déterminant pour une bonne glisse. J'ai tout de même joué le compromis en donnant plus de giron a l'arrière par rapport a un kayak de surf pur. Après réflexion ca n'a surement pas été une bonne idée...
Les kayaks de surf courts ont aussi beaucoup de volume sur le pont arrière, pour éviter au bateau de se cabrer quand la mousse tombe dessus. Voilà à peu près les profils:
Après l'expérience gagnée lors de la construction du Pani Piyo en 2007-2008 dont j'avais fait un moule, j'opte cette fois pour la construction "one-shot" que j'avais déjà utilisée par le passé. Le principe est de shaper le kayak sur un bloc de polystyrène, de stratifier par dessus, puis finalement de creuser le polystyrène depuis l'intérieur. Le shape en polystyrène n'est donc utilisé que pour un seul kayak. La décision en faveur d'un "one-shot" a été prise pour raisons suivantes:
- C'est ma première forme de ce type. Donc, à cause du manque d'expérience je vais sûrement vite avoir des idées de modifications qui pourront être mises en oeuvre lors d'un prochain shape. De ce point de vue on pourrait dire que je fais un proto, et faire un moule n'a pas vraiment de sens
- Le "one-shot" prend moins de temps et coûte moins cher. Et surtout comme je travaille seul, investir dans un moule n'est pas rentable
- Je n'ai pas de place pour stocker un moule
Les dates mentionées pour chaque étape donnent une idée du temps que j'ai pris. Bien sûr ca aurait pu aller beaucoup plus vite.
26 Mai: Le bloc de polystyrène a été préparé avec des plaques collées a la résine époxy. Je commence par découper les profils avec un fil chaud, grâce à des gabarits en carton. La découpe au fil chaud est presque indispensable si on veut d'éviter des journées à scier et poncer le polystyrène, a vérifier la symétrie, puis nettoyer les billes blanches qui se fourrent dans tous les coins, etc.
27 Mai: Une fois les profils découpés, je shape les bouchains de la coque. Après avoir tracé les lignes, je découpe a main levée avec un fil chaud, puis je ponce au papier de verre.
Quand la coque est finie, je m'attaque au pont. Avant tout je creuse l'hiloire qui démarque le terrain pour le reste des découpes, puis je dégrossis au fil chaud avant de poncer au papier de verre.
28 Mai: après avoir bien poncé et vérifié la symétrie, la forme est finie et prête a être stratifiée:
Pour la stratification, j'utilise (en partant du polystyrène):
- 1 tissus d'arrachage. C'est important pour un one-shot car la résine imbibe le polystyrène qui devient très difficile a enlever de l'intérieur.
- 5 tissus de verre sergé (280 g) sur la coque et 4 sur le pont.
- 1 tissus de verre fin (80 g) pour la surface.
2 Juin: Stratification de la coque. Une fois la stratification finie j’ai posé des bandes de tissus d’arrachage au niveau de la soudure. Le tissus d’arrachage s’enlève une fois que la résine est prise. Ca donne une surface optimale pour que la stratification du pont accroche bien dessus, et facilite aussi le poncage qui est en général tout de même nécessaire.
6 Juin: Stratification du pont.
8 et 9 Juin: Poncage de la surface et creusage du polystyrène. J'avoue que faire un one-shot a des aspects désagréables:
Etant donné qu'on stratifie de l'intérieur vers l'extérieur, la surface a des défauts qu'on doit poncer pour obtenir un beau résultat final (pas obligatoire, ca marche aussi sans). Pour pouvoir poncer dans de bonnes conditions avec rigidité maximale, je ponce (grain 60) avant d'enlever le polystyrène. On voit sur la photo que lors du poncage j'ai touché différentes couches en fonction de l'importance des défauts
Enlever le polystyrène est assez laborieux. J'ai utilisé trois méthodes: le fil chaud, l'opinel et aussi l'acétone, surtout pour les pointes. La prochaine fois j'essaierai la barre a mine.
Apres avoir enlevé le tissus d'arrachage la surface intérieure est prête pour installer le siège, les chandelles, etc. Pas besoin de poncer.
13 Juin: j'ajoute sur la coque une réhausse pour le siège (styrodur de 5 cm d'epaisseur) ainsi des pièces longues pour faire une sorte de sandwich (aussi en styrodur) puis je stratifie 3 couches de tissus par dessus. Tout cela rend la coque rigide.
4 Juillet: reprise des activités avec la construction de l'hiloire (photo ci-dessus).
5 Juillet: découpe de l'hiloire et fixation des anneaux de bosse.
9 Juillet: Fixation du siège et glassage du pont à la résine epoxy. Il faut environ 150 à 200 g de résine pour le glassage.
11 Juillet: Glassage de la coque et fixation des chandelles qui finissent de rigidifier le tout. Il ne reste plus qu'à coller de la mousse dans le siège et au niveau des genoux pour finir les calages. Pour les pieds j'utilise une planche en bois; c'est peut etre pas le plus léger, mais ca tient bien.
Poids final: 10 kg
Budget: environ 300 Euro.
Ailerons?: Pour le moment je vais faire sans, on verra par la suite
Après test: Je me suis bien amusé avec ce kayak pendant quelques semaines à l'océan. Sa glisse était suffisante pour surfer la plupart des vagues, surtout comparé à un kayak freestyle.
Mais pour vraiment en faire un kayak de surf il y a des détails importants à corriger:
- Le rocker a l'arrière (le "lift") est trop important. Le kayak manque un peu de glisse ce qui limite ses capacités de surf a l'ocean.
- Le giron à l'avant est trop faible
- En plus de tout ca, le siège est placé trop a l'avant et j'avais tendance à enfourner.
Update 2021: j'ai reculé le siège d'environ 10cm. Il est maintenant a 65cm de la pointe arrière et ca marche beaucoup mieux, meme si j'ai perdu un peu en glisse. Je l'ai aussi relevé de 2cm supplémentaires (donc en tout 7cm)
